De février à juin, plusieurs acteurs de la filière vrac ont testé ensemble en Ile-de-France un nouveau concept de plateforme mutualisable et modulaire à l’échelle régionale permettant le nettoyage, le reconditionnement et le réemploi des emballages de conditionnement des produits vrac utilisés en amont de la filière. L’objectif ? Réduire les emballages à ce stade de la filière ! Co-portée par Réseau Vrac, WeBulk et Petrel, cette expérimentation de 5 mois a montré un bon potentiel : les bilans opérationnel et environnemental sont tous deux positifs ; non seulement le système de Hub Vrac fonctionne mais il représente également une véritable plus-value environnementale. En revanche, les résultats sont plus mesurés au niveau économique. Le modèle, qui reste à optimiser, doit passer à l’échelle pour assurer sa viabilité économique..

Une filière mobilisée en Ile-de-France pour évaluer la faisabilité d’implantation de Hub Vrac

Le pilote a rassemblé 9 commerçants franciliens, 6 fournisseurs de produits vrac secs, 1 logisticien, 1 centre de lavage, 1 transformateur, 1 place de marché, 1 transporteur et l’association professionnelle Réseau Vrac. Il devait notamment permettre de tester l’efficacité d’un système de gestion circulaire des emballages amont (évaluation de la praticité d’utilisation pour les commerçants, de la conservation et bonne tenue des produits), de vérifier la pertinence écologique du système (pas d’effet rebond) ainsi que d’évaluer la faisabilité économique du projet.

Les commerçants franciliens ont ainsi pu tester un total de 20 références de produits vrac secs (farine, biscuits, fruits secs, pâtes, semoules…) dans des bacs réutilisables. En moyenne les commerçants achetaient 6 bacs par commande. Une boucle complète de bacs a pu être effectuée, à savoir une reprise des bacs vides en boutique par le transporteur, le nettoyage des bacs chez Pandobac et le reconditionnement de ces derniers chez FM Logistic.

Un retour d’expérience positif de la part des acteurs impliqués

Pendant toute la durée du pilote, les commerçants ont dû scanner les bacs reçus et répondre à un questionnaire sur la qualité et la praticité des bacs et des produits grâce à l’application développée par Petrel. 75% des questionnaires ont été remplis par les commerçants, pour un taux de satisfaction de 90%.

Première source de satisfaction pour les commerçants : la réduction des emballages jetables. En effet, ces déchets ne correspondent pas à la philosophie du commerce vrac, ils peuvent engendrer un sentiment de malhonnêteté auprès du client, comme en témoigne Anne-Laure de Boc’s (15e arrondissement) :

“Quand j’ouvre ma réserve qui donne directement sur les sacs jetables, l’image est problématique vis- à- vis de mes clients”

Autre point positif souligné : la robustesse des bacs. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la casse produit s’est avérée égale voir plus faible avec les bacs réutilisables qu’avec l’emballage classique jetable (4 commerçants notent moins de casse, les autres n’ont pas vu de différence). Les emballages en plastique ou en kraft ne sont donc pas toujours idéaux en termes de protection produit. Victoire, gérante de Ma Petite Ferme dans le 15e arrondissement en a fait l’expérience :

“ Ce matin par exemple, j’ai eu un trou dans un sac plastique de café”

Des points d’améliorations ont été identifiés pour améliorer l’étanchéité de certains bacs. Ce défaut identifié a pu entraîner la détérioration de certains produits (noix de cajou, amandes) mais ces phénomènes sont restés minimes.

Le remplissage du bac a pu entraîner des difficultés de manipulation, comme l’explique Lauriane, gérante du commerce Mood Épicerie, dans le 11e arrondissement :

“J’ai eu des penne dans un bac trop rempli et ça a été la catastrophe au moment de la mise en silo”

Une recherche de bacs plus adaptés à cette activité est en cours afin de perfectionner la phase de test qui a été réalisée avec du matériel existant.

Le test du Hub Vrac a permis de répondre aux enjeux de protection produit, de praticité de manipulation et de stockage qui pouvaient jusqu’ici être un frein pour les fournisseurs et les commerçants. Nathalie, fondatrice de Couleur Vrac a Créteil, investie dans le projet depuis ses débuts résume ainsi :

“Je suis plus que satisfaite du pilote, c’est un vrai succès !“

Pour FM Logistic, l’expérience de reconditionnement des produits fournisseurs dans les bacs s’est globalement bien déroulée. Yannick BUISSON, Directeur Général France et Europe de l’Ouest FM Logistic, témoigne de l’importance du projet pour l’entreprise :

“Au travers de ce pilote, qui s’inscrit complètement dans notre stratégie de développement d’offres durables, nous souhaitons jouer un rôle clé dans la construction d’une logistique du vrac”

Il reste notamment des améliorations à apporter dans le volume des bacs qui n’était pas toujours adapté (d’où les soucis de bacs trop remplis évoqués par les commerçants) ou sur l’optimisation des palettes.

Côté nettoyage avec Pandobac, le retour est très positif, mis à part un bac cassé durant le nettoyage et des résidus de scotch ou d’étiquettes difficiles à faire partir. Shu Zhang co-fondatrice de Pandobac insiste sur l’importance de l’initiative :

“Le vrac et le réemploi sont totalement complémentaires à mon sens, et le projet du Hub Vrac en est l’illustration parfaite. Nous avons pu tester le lavage de contenants d’un format différent de nos contenants habituels, nous avons rencontré et échangé avec plein de personnes formidables et engagées, et cela nous donne des pistes pour réfléchir au déploiement à plus grande échelle du réemploi. Aujourd’hui, je reste réaliste et le projet du Hub Vrac n’est qu’une toute première étape et nous espérons bien faire partie du reste de l’aventure.”

Les fournisseurs engagés dans le projet ont émis des retours positifs sur leur expérience, contents de pouvoir proposer une offre de bacs réutilisables à leurs clients commerçants et désireux de voir ce genre de modèles se développer :

“Nous sommes contents de faire partie de cette première expérimentation et espérons, qu’à termes, d’autres sites avec de plus grandes capacités de réception se développeront afin d’obtenir une véritable plus-value environnementale et économique” Marie Garec, Agro Sourcing.

“Ce projet a nécessité d’organiser toute l’information de la traçabilité des matières premières ; un vrai challenge car il a fallu éditer pour le même produit plusieurs étiquettes afin d’assurer la bonne diffusion des contenus. Le Hub Vrac a besoin de prendre son envol afin de massifier les flux de vrac et de consignes, pour apporter la meilleure réponse au défi zéro déchet.” Christophe de Saint-Pierre, Moulin des Moines.

Bilan environnemental : les feux sont au vert !

Un risque identifié par les acteurs du projet de Hub Vrac était de déplacer le problème des emballages jetables vers une augmentation du bilan carbone ou de la consommation d’eau liés au transport et au nettoyage des bacs.

Après étude des données issues du pilote, il s’avère que les résultats sont positifs : le système de Hub Vrac présente bel et bien une plue-value environnementale. Au bout de 7 cycles de bacs, le réemploi via le système WeBulk a un meilleur impact que le modèle préemballé. Le pilote a permis de réduire les émissions C02 de 0,5kg par rapport à un système de livraison directe avec emballages à usage unique. Enfin, on estime que 50kg d’emballages jetables ont pu être évités grâce à 161 bacs réutilisables vendus dans le cadre du pilote de Hub Vrac.

Un modèle économique à trouver

Le coût par cycle et par bac calculé pendant la phase de test regroupait le prix du bac, le transport, le stockage, le reconditionnement et le nettoyage. Les investissements du pilote ont été supportés par WeBulk et aucun surcoût n’a été appliqué ni pour les fournisseurs, ni pour les commerçants. Pour qu’un tel système soit rentable, des coûts supplémentaires importants devraient donc être appliqués au coût d’achat du produit, ce que les commerçants peinent à accepter. S’ils comprennent bien que le service ne peut pas être gratuit compte tenu du travail derrière, les commerçants expliquent que ce coût ne doit pas passer du simple au double et refusent de faire porter l’effort écologique sur le consommateur.

La solution résidera donc dans la massification des volumes qui permettrait d’optimiser les différents postes de dépenses et ainsi d’obtenir un coût par cycle et par bac acceptable. En prenant l’hypothèse d’une centaine de commerces clients d’un Hub Vrac en région Ile-de-France et d’un nombre de bac commandés supérieur au test, le coût par cycle diminue de 32%. Il faut également prendre en compte l’optimisation des coûts unitaires en fonction du volume (conditionnement, lavage, coût d’achat des bacs…) ainsi que le transfert de coûts induits par le modèle zéro-déchet (optimisation du transport amont, remplissage pris en compte, pas d’achat d’emballage unitaire…).

Enfin l’aide de collectivités territoriales ou de structures telles que l’ADEME, Léko ou Citeo pourraient permettre de soutenir financièrement la phase de passage à l’échelle du modèle.

En conclusion, un bilan très positif pour le Hub Vrac qui prouve son fonctionnement, son utilité et sa pertinence. Reste à penser un modèle économique efficace pour déployer et généraliser des plateformes de ce type comme le soulignent les principaux opérateurs du projet.

Hugues Pelletier, fondateur de Petrel résume ainsi l’expérience Hub Vrac :

"Le projet HubVrac nous a permis de valider le fonctionnement opérationnel de la boucle de réemploi et de recueillir de nombreux enseignements. Le développement d’un outil de suivi adapté et l’utilisation du Petrel Hub a permis de suivre précisément les stocks de contenants sur toute la chaîne et de récupérer des données qualitatives sur les produits. Enfin nous avons pu valider l’avantage écologique du contenant réemployable dès 7 cycles d’utilisation. Il reste désormais à optimiser le bilan économique, en prenant en compte les transferts de coûts et des volumes plus importants"

Côté WeBulk, Laure Dijon, responsable des opérations explique que l’entreprise est très fière d’avoir participé à ce premier pilote en Ile-de-France :

“Nous avons eu beaucoup de plaisir à partager ce projet avec nos commerçants d’Île-de-France et à voir leur enthousiasme. Cela nous conforte dans notre envie de mettre en place des Hubs Vrac régionalement. Les résultats du Pilote nous montrent qu’opérationnellement cela est possible et répond aux exigences de nos épiceries. Il faut maintenant réussir à construire un modèle à grande échelle viable pour tous !”

Selon Célia Renneson, Directrice générale de Réseau Vrac : "L’expérimentation se conclut sur un bilan très encourageant pour le modèle Hub Vrac. Il prouve son fonctionnement, son utilité et sa pertinence. Reste à mettre en place une solution économiquement viable pour déployer et généraliser des plateformes à grande échelle. Certains de nos adhérents, attentifs à la démarche en Ile-de-France et convaincus de son importance se lancent dans la mise en place de Hub Vrac dans d’autres régions."

Un présentation détaillée du pilote sera présentée aux adhérents de Réseau Vrac le 27 septembre à Marseille à l’occasion des 5 ans de l’association ainsi que le 4 octobre en visio-conférence.


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